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Le blog de Myriam Alamkan

Histoire maritime et patrimoine de la Caraïbe.

19 décembre 1852 : la construction du phare de La Caravelle (Martinique) est actée.

19 décembre 1852 : la construction du phare de La Caravelle (Martinique) est actée.

Nous quittons les rivages de la Guadeloupe pour la Martinique à la découverte des plus anciens phares des Antilles Françaises. Le plus ancien phare de l’île est celui de la Caravelle. Le site internet de la Direction de la Mer de Martinique, reprend une chronologie relative au phare de La Caravelle depuis les premières lettres évoquant sa construction jusqu’à sa rénovation et son inscription aux Monuments Historiques.

Nous vous invitons à lire l’intégralité de la minute de la séance de la commission des phares du 19 décembre 1852, relative à l’établissement d’un phare sur la Pointe de la Caravelle (Martinique).

Situé sur la côte Atlantique, la presqu’île de la Caravelle fait partie du territoire administratif de la commune de La Trinité. La Caravelle abrite aujourd’hui une réserve naturelle sur 388 hectares et un très ancien phare. Nous allons à travers cette minute découvrir l’amiral Mathieu. Né le 1er août 1790 à Lyon (département du Rhône), Aimé (Pierre Louis Aimé) Mathieu est officier de marine. Il est gouverneur de la Martinique du 2 décembre 1844, jusqu’à la nomination du gouverneur provisoire Rostoland, maréchal de camp, le 27 mars 1848. L’amiral Mathieu poursuivra sa carrière comme directeur général du Dépôt des cartes et plans de la Marine puis il sera membre et même vice-président du Bureau des Longitudes. Il sera également membre de la commission des Phares. L’amiral Mathieu sera élevé au rang de contre-amiral le 18 octobre 1846. Ses compétences en dessins et la qualité de ses levées hydrographiques ont été remarqué par M. de Hell qui le choisit pour effectuer la reconnaissance de la Corse comme le souligne l’amiral E. Paris dans la nécrologie qui lui a consacrée dans la Revue Maritime et coloniale volume 29, 1870 pages 388 à 390.

 

 

Texte intégral : établissement d’un phare sur la pointe de Caravelle, à la Martinique. (p 71 à 74).

Conformément à une invitation de M le ministre de la marine et des colonies, le Secrétaire met sous les yeux de la commission les pièces relatives au projet de construction d’un phare de 3ème ordre sur la presqu’île de Caravelle, à la Martinique.

Un des membres de la Commission, M. l’amiral Mathieu, prend la parole, et expose les faits dont le résumé suit : la nécessité d’établir un phare au vent de l’île, où les atterrages offrent aux navigateurs de nombreux dangers, est reconnu depuis longtemps, et avait sérieusement fixé son attention, lorsqu’il était gouverneur de cette colonie. Il a voulu examiner par lui-même la position à assigner à cet établissement, il s’est rendu sur les lieux, au commencement de l’année 1848, et que l’emplacement le plus convenable sous tous les rapports était celui du gros rocher de Caracoli, sur la presqu’île de Caravelle ; lequel domine de 140 mètres le niveau des plus hautes mers et se trouve en vue avant qu’on s’approche des écueils. C’est par son ordre qu’ont été levé les plans et profils qui ont été soumis à la Commission, et il eût immédiatement poursuivit sa réalisation du projet qu’il avait conçu, si les évènements politiques de 1848 n’y avaient mis obstacle. M. l’amiral Mathieu présente ensuite à la Commission deux cartes hydrographiques de la Martinique, plusieurs vues de la pointe de Caravelle dessinées par lui de diverses stations en mer, et quelques unes des notes qu’il avait prises dans cette tournée.

Après avoir entendu cet exposé, la Commission prend connaissance des pièces du dossier, et entr’ autres des rapports (16 juin 1850 et 25 mai 1851) de l’ordonnateur de la colonie, du rapport (7 avril 1851) de la commission nautique charger d’examiner de nouveau l’emplacement le plus convenable pour l’établissement du phare, des délibérations (19 juin 1850 et 2 juin 1851) du conseil privé de la Martinique, des lettres (20 juin 1850 et 27 juillet 1852) dressées à M. le Ministre de la Marine par le Gouverneur de la Martinique, M. l’amiral Vaillant, des plans et profils des lieux, des dessins de l’édifice projeté et du détail estimatif y est annexé, et de la lettre d’envoi (27 7bre 1852) de m. le Ministre de la Marine. Puis elle examine successivement les diverses questions qu’elle est appelée à traiter, et présente les observations suivantes : l’utilité du phare projeté est incontestable, et l’emplacement indiqué parait très convenable sous tous les rapports. On avait proposé d’établir sur ce point un appareil à feu fixe de 2ème ordre, mais il n’est pas nécessaire d’avoir recours à un éclairage aussi puissant dans ces parages, et des motifs d’économie doivent faire préférer un appareil de 3e ordre, ainsi que l’a pensé l’ordonnateur de la colonie. Ce dernier appareil aura une portée de quinze mille au moins, laquelle suffira aux besoins de la navigation, et entrainera à beaucoup moins de dépenses que l’autre, tant en ce qui est des frais de premier établissement, qu’en ce qui concerne les dépenses annuelles d’entretien. Un appareil munis d’une lanterne et de ses lampes, éclairant les 4/5ème de l’horizon, couterait, en effet, environ 35.000 fr. s’il était de 2ème ordre, et ne s’élèvera à pas plus de 19.000 fr. s’il est de 3e ordre ; et quant aux frais d’entretien annuel, ils varient sur les côtes de France de 3.500 à 6300 fr pour les phares de la première espèce, et de 2.100 à 3,800 fr. pour ceux de la seconde.

Mais si les dispositions du projet présenté sont entièrement satisfaisantes en ce qui concernent les intérêts nautiques, il n’en est pas les mêmes au point de vue de l’art des constructions. Les chambres des gardiens n’ont que 1m60 de largeur, et leur forme parait peu convenable ; le magasin est de dimension trop restreinte pour pouvoir renfermer tous les approvisionnements nécessaires ; la galerie qui entoure la lanterne n’a que 0m40 de largeur, ce qui est loin de pouvoir suffire ; on ne voit pas comment s’établirait l’appareil d’éclairage au sommet de la tour ; enfin l’édifice, trop étroit pour les usages auxquels il s’agit de pourvoir, est trop large, si l’on s’en rapporte au plan joint au dossier, pour être assis sur le rocher qui doit le recevoir.

Il semble qu’il conviendrait, dans les circonstances où l’on se trouve placé, d’adopter un parti tout différent, de celui auquel on s’est arrêté. Au lieu d’établir sur l’étroit plateau du rocher un édifice renfermant le logement des gardiens, on pourrait se borner à la construction d’une salle voutée de 4m environ de hauteur, au-dessus de laquelle s’élèverait le soubassement en maçonnerie de la lanterne du phare ; un petit escalier circulaire à noyau plein conduirait dans la lanterne et sur la plateforme. Cette salle servirait de magasin pour le phare et renfermerait deux lits (un pour chaque gardien), afin que celui de ces agents qui sera de quart puisse être, en cas de besoin, immédiatement secouru par l’autre. Un logement supplémentaire, dans lequel les gardiens auraient leur cuisine et pourraient se tenir le jour, serait construit au pied du rocher dans les conditions les plus économiques. La crête de rocher marqué B sur le plan serait dérasée, si elle occultait le feu, qui ne serait élevé, dans cette disposition, qu’à 7m50 environ au-dessus de la plateforme du rocher A. La construction aussi établie serait plus convenable pour le service, plus durable et moins dispendieuse. La Commission ne voudrait pas affirmer que les dépenses de ce projet n’atteindront pas au chiffre 13,711.65, auquel le porte de devis estimatif ; mais elle doit faire remarque que cette pièce présente plusieurs omissions, et que si quelques prix apparaissent très élevés, il en est insuffisant.

La Commission charge son secrétaire d’étudier et de soumettre à M. le ministre de la Marine, pour être transmis, s’il y a lieu au, au gouverneur de la colonie, afin de servir de base à la rédaction du nouveau projet à demander, les dessins d’un édifice distribué conformément au programme qu’elle vient de tracer, et d’y joindre une estimation détaillée de l’appareil d’éclairage qui sera nécessairement envoyé de France.

La Commission conclut dans sa délibération en émettant l’avis qu’il y a lieu d’adopter les dispositions suivantes :

1° Approuver en principe l’établissement d’un phare de 3e ordre à feu fixe, sur la pointe de Caravelle, dans l’emplacement désigné au projet, et prendre les mesures nécessaires pour que ce travail soit promptement mis en exécution ;

2e inviter M. le Gouverneur de la Martinique à provoquer un nouveau projet pour la construction du phare, en prescrivant à se borner à établir sur le rocher un petit édifice, distribué conformément au programme ci-dessus développé, et à construire au pied du rocher un logement pour les gardiens disposé dans les conditions les plus économiques. »

Cependant, le phare en lieu-même ne fut construit que bien plus tardivement entre 1860 et 1861. Et peu à peu le rôle de l’ancien gouverneur l’amiral Mathieu s’évanoui dans les mémoires. L’allumage du feu fut annoncé dans la presse nationale. Voici un extrait du journal La Presse, publié à Paris, du 20 novembre 1861 : « A partir du 1er janvier prochain, le phare établi à la pointe de la Caravelle fonctionnera régulièrement et sera d’un grand secours à la navigation. Les travaux sont presque terminés, et l’on aperçoit les feux à près de trente milles en mer. » Le phare de La Caravelle aujourd’hui automatisé est toujours en service.

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