19 Juillet 2020
Si la majorité des naissances se font habituellement dans le confort des hôpitaux ou cliniques, elles deviennent beaucoup plus rares de nos jours, sur les flots. Et quand cette naissance est gémellaire, elle est encore plus marquante. C’est le cas que je vous propose de découvrir. En lisant l’état-civil de la ville de Basse-Terre, Guadeloupe, vous pouvez découvrir annexer au registre de naissance de 1854 deux actes de naissances qui ont pour particularité de concerner des frères jumeaux nés à des coordonnées géographiques différentes.
Ce site propose plusieurs images de l'Armide à découvrir.
Le 14 août 1854, Julie Marguerite Lantaros épouse de Théophile Georges Cochez, maréchal des logis de la gendarmerie, accouchât à bord du navire hôpital Armide, de ses fils. Les deux actes d’état-civil précise que Pierre Arthur Cochez est né par 12°18’ de latitude Nord et 36°15’ à 5h00 du matin et son frère Théophile Paul Cochez est né à 5h30 du matin par 12°18’ de latitude Nord et 34°15’ longitude ouest. Oui, comme tous marins, ces coordonnées m’interpellent mais ce n’est pas le sujet du jour, faisons plus ample connaissance du lieu de naissance à savoir l’Armide, sur lequel Marguerite Lantaros avait embarquée comme simple passagère en compagnie de son mari Théophile Cochez.
L’Armide est un navire hôpital, plus précisément la frégate hôpital Armide de classe Thétis a été mis à flot en 1821 (Dictionnaire des bâtiments de la flotte de guerre française de Colbert à nos jours. Lieutenant de vaisseaux Jean-Michel Roche. Tome 1 (1671-1870) JMR, 2005. Page 35). Converti en navire hôpital Armide effectue plusieurs croisières, c’est ainsi que les deux l’actes d’état-civil précisent que le navire Armide a été armé à Brest. De plus, Emile Bouillon aide-commissaire de la marine, officier d’administration indique avoir communiquer une copie de l’état-civil au commissaire de marine à Cayenne « à bord ».
Un examen du Bulletin officiel de la Guyane Française (imprimé par le Gouvernement en 1855, page 362) liste la présence de plusieurs fonctionnaires qui ont embarqué sur l’Armide soit parce qu’ils sont en congés pour convalescence comme Auguste La Borde (sous commissaire de marine), Félix Jean Agarrat (commis de marine), Jacques Turnier (chef de cuisine à l’hôpital de Cayenne), Pierre-Marie-Benjamin Girard (commis de marine), François Moreau (surveillant 2ème classe des pénitenciers) et Paul-Maire Stricot surveillant 3ème classes des pénitenciers). Certains ont en plus bénéficié d’une concession de passage comme Jean-Jaques-Michel Saint-Clair (écrivain de marine), monsieur Aubin (infirmier, attaché au service de la transportation), Guillaume Lelayé (distributeur 1ère classe), Germain Peyras (surveillant 3ème classe des pénitenciers). D’autres sont autorisés à partir parce que leur « temps de service colonial est expiré » comme monsieur Raynaud (chirurgien principal de la marine), monsieur Colson (chirurgien 1ère classe), monsieur Autret (pharmacien de 2ème classe) et Berg (chirurgien de 3ème classe). Grace au Bulletin officiel nous savons que les derniers passagers ont été autorisé à embarquer le 14 septembre 1854 avec la France pour destination finale. Cependant nous n’avons trouvé aucune mention corroborant la présence du commissaire de marine à Cayenne à bord de l’Armide à partir de cette source.
Puisque les deux époux étaient domiciliés à Basse-Terre, en Guadeloupe, avant leur embarquement, c’est donc à la ville de Basse-Terre de les inscrire à l’état-civil à la suite d’un courrier adressé par le commissaire aux armements Lahaye au service d’état-civil de la ville de Basse-Terre, comme le précise le Code Napoléon (article 60 et 61) alors en vigueur. Ce qui sera fait avec une célérité relative puisque l’Armide va relâcher en Guadeloupe le 28 septembre 1854 comme l’indique le commissaire aux armements de la ville de Basse-Terre mais la transcription dans l’état-civil de la ville date du 21 novembre 1854.
En outre, nos recherches n’ont pas permis de trouver en ligne, le bulletin officiel de la Guadeloupe expliquant la présence à bord du maréchal des logis Cochez. L’escale en Guadeloupe était-elle prévue ou a-t-elle permis à la l’ensemble de la famille de mettre pieds à terre ? Nous pouvons simplement noter que le maréchal des logis Cochez était en Guadeloupe au moment où il fait valoir ses droits à la retraite qu’il obtient par décret impérial du 6 août 1865 (Bulletin des lois de la République française volume 26, n°1142, p 242) et qu’il y demeure après sa retraite comme le montre l’Annuaire de la Guadeloupe et dépendances (Imprimerie du gouvernement, 1868, page 217) où ce récipiendaire de la Légion d’honneur réside. Juste une naissance pas si ordinaire sur un bateau plus habitué aux transports d’hommes convalescents et très peu aux femmes enceintes.
Pour aller plus loin p 115, quelques détails sur le nombre de malades transportés par l’Armide du Sénégal, de la Martinique, de la Guadeloupe et de Guyane.